Analyse et rédaction – Cours en droit et commerce électronique (10-15)
Le bitcoin; pour ou contre son utilisation?
Différents facteurs démontrent que le système de paiement par Bitcoin a fait preuve, jusqu’à ce jour, d’avantages et d’inconvénients. Pour pouvoir prendre une décision éclairée, quant à l’utilisation ou non de cette forme de paiements, il est important de bien définir et comprendre son fonctionnement, s’assurer de sa sécurité d’utilisation et vérifier ses aspects légaux. Un sommaire de son évolution économique présente aussi un aperçu des possibilités d’avenir du Bitcoin.
Description du Bitcoin
Bitcoin est une technologie qui a été proposée pour la première fois en 2008 dans un livre blanc rédigé par Satoshi Nakamoto.[1] Depuis sa création en 2009, par un groupe anonyme de développeurs, Bitcoin a servi environ 62,5 millions de transactions entre 109 millions de comptes.[2]
Le bitcoin est un type de monnaie virtuelle, aussi appelé monnaie numérique ou cryptomonnaie, créé par des algorithmes informatiques. Le terme « cryptomonnaie » désigne « une monnaie virtuelle sans lien avec une politique monétaire ou une banque, dont l’implémentation repose sur des algorithmes de chiffrement. »[3] Il s’agit donc, d’un type d’argent virtuel qui est transféré d’un utilisateur à l’autre par voie électronique. Les bitcoins peuvent être échangés contre des monnaies traditionnelles. Ils peuvent être conservés dans un portefeuille virtuel ou numérique et ensuite utilisés pour acheter des biens et des services sur Internet et dans des magasins qui acceptent ces formes de monnaie.
L’achat et la vente des bitcoins se font sur des plateformes d’échange spécifiques. Contrairement aux monnaies traditionnelles, qui sont émises par les banques centrales, Bitcoin n’a aucune autorité monétaire centrale. Ce système de paiement n’est donc pas contrôlé par une seule institution, il s’appuie plutôt sur un réseau pair-à-pair (P2P) décentralisé. Les « pairs » sont les utilisateurs qui prennent part aux opérations, et leurs ordinateurs constituent le réseau.[4] Pour ses utilisateurs, Bitcoin est comparable à de l’argent liquide pour Internet.[5]
Les utilisateurs peuvent aussi agir à titre de « mineur ». Le mineur s’occupe de traiter les transactions financières sur le registre global du réseau Bitcoin, communément appelé « blockchain ».[6] Le minage se fait en utilisant du matériel informatique pour effectuer des calculs mathématiques, pour le réseau Bitcoin, afin de confirmer des transactions et augmenter la sécurité. Comme récompense pour leurs services, les mineurs de Bitcoin collectent les frais de transactions, lorsqu’elles sont confirmées et les bitcoins nouvellement créés.[7] Le système de paiement Bitcoin est contrôlé par tous ses utilisateurs à travers le monde, mais ceux-ci doivent utiliser des logiciels qui se conforment aux mêmes règles. Ce facteur nécessite l’adoption et la protection d’un consensus entre les utilisateurs et les développeurs.[8] Le logiciel peut être téléchargé gratuitement sur le site de bitcoin.org. Ce site permet aussi à l’utilisateur de se créer un « portefeuille », soit un fichier pour conserver ses bitcoins, sans donner son nom ou une preuve d’identité.
Les frais d’utilisation
Il est possible d’émettre et de recevoir des paiements avec le réseau Bitcoin presque sans aucuns frais. Très souvent, les frais ne sont pas exigés, mais ils sont recommandés pour une confirmation plus rapide des transactions.8 En revanche, les commerçants utilisant le mode de paiement par cartes de crédit doivent payer des « frais d’escompte des commerçants ». Ces frais sont calculés par un pourcentage du bien ou du service acheté. Ils peuvent varier de 1,5 % à 3 %. Ces frais couvrent, entre autres, la location de terminaux, la protection contre la fraude et les reçus de transactions. Mais la plus grande composante de ces frais est basée sur le taux d’échange, qui est fixé par les sociétés de cartes de crédit.[9]
La traçabilité de l’échange est plus facile avec une carte de crédit. Le paiement par bitcoins ne permet pas d’obtenir systématiquement un relevé détaillé comme avec une carte de crédit. Par contre, le protocole utilisé par le réseau Bitcoin est anonyme jusqu’au moment où les valeurs en bitcoins doivent être transférées à d’autres systèmes monétaires. Ce transfert demande alors une preuve d’identité et c’est ainsi que certains réseaux illégaux tels que Silkroad, l’« eBay de la drogue », ont été démantelés et leurs responsables arrêtés.[10]
Aspect sécuritaire
La cryptographie et les progrès techniques ont aidé à résoudre les problèmes de contrefaçon et de double dépense qui rendaient auparavant impossible l’adoption des monnaies électroniques décentralisées comme le bitcoin.[11] Ces outils de chiffrement complexes permettent de sécuriser les transactions.[12] Certaines mesures peuvent être prises pour protéger le système de paiement Bitcoin. Par exemple, un enregistrement de chaque opération virtuelle est rendu public pour tenter de prévenir la reproduction frauduleuse d’unités de monnaie virtuelle.[13] Ces mesures sont importantes en se rappelant que d’autres scandales ont déjà été liés au réseau Bitcoin, en plus de celui de Silkroad, tels que la disparition d’Evolution, une plateforme du « Dark web » qui permettait de se procurer des drogues et des armes illégales.[14] Le système de paiement Bitcoin est considéré comme une véritable révolution technologique et économique pour certains, et un outil pour financer le terrorisme et les activités pour d’autres. Son utilisation est donc très controversée[15].
Aspects légaux
Les approches législatives mondiales sont très variées au regard des bitcoins. Au Canada, le bitcoin n’est pas juridiquement une monnaie.[16] Il est reconnu pour des contrats d’échange, sous forme de troc, mais non pour des contrats de vente.
Des lois provinciales et fédérales peuvent s’appliquer à l’utilisation du bitcoin, dépendamment le contexte du recours, comme la Loi sur la protection du consommateur[17] ou le Code criminel.[18]
La Loi sur la protection du consommateur « s’applique à tout contrat conclu entre un consommateur et un commerçant dans le cours des activités de son commerce et ayant pour objet un bien ou un service. » Elle pourrait donc s’appliquer pour un contrat d’échange concernant l’utilisation des bitcoins. En 2014, le Canada a fixé un cadre de régulation des transactions en monnaies virtuelles. Les sociétés utilisant des bitcoins doivent s’enregistrer auprès du Fintrac (Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada), afin que l’État puisse tracer les transactions.[19] En reconnaissant le bitcoin et d’autres monnaies virtuelles, les autorités du pays soumettent les entreprises au même règlement que les établissements soumis aux services monétaires.[20] Cependant, le Bitcoin ne bénéficie pas du système national de compensation régi par l’Association canadienne des paiements (ACP)[21], comme les autres systèmes standards de paiements au Canada.
Évolution du Bitcoin
Le marché du Bitcoin démontre un risque financier par sa grande volatilité, avec de nombreux investisseurs avertis sur les fluctuations des prix cotés pour les BTC (le symbole du titre Bitcoin).[22] En 2010, les premiers échanges de devises ont émergé avec Mt. Gox affirmant la position de leader du marché. Tout au long de 2010, 2011 et 2012, Mt. Gox a maintenu sa position, avec une part de marché de plus de 80%. À la fin de 2012, le prix d’un Bitcoin était d’environ 10 $ US, à la fin de 2013, il était d’environ 1000 $ US. En février 2014, une série d’événements a provoqué une chute dramatique des prix, ce qui a conduit Mt. Gox à la faillite.[23] Plus récemment, en mars 2015, le volume quotidien des transactions était d’environ 200,000 bitcoins, soit environ 50 millions $ au taux de change du marché. (Blockchain.info 2015).[24] Résumé du marché du Bitcoin en mars 2015 :
- Total de bitcoins minés : environ 14 millions
- Équivalence en dollar US au prix du marché : environ 3.5 billions
- Nombre total d’ordinateurs publics connectés sur le réseau Bitcoin : environ 6,500
- Total cumulatif du nombre de transactions : environ 62.5 millions
- Total du nombre d’acomptes utilisés : environ 109 millions
- Dimension du Blockchain : environ 30.3 GB
Sources:
[1] Satoshi Nakamoto, « Bitcoin: A Peer-to-Peer Electronic Cash System » – http://bitcoin.org/bitcoin.pdf.
[2] Rainer Böhme, Nicolas Christin, Benjamin G. Edelman, Tyler Moore, « Bitcoin: Economics, Technology, and Governance », Journal of Economic Perspectives, 2015, volume 29, no. 2, pages 213-238 – http://bit.ly/1LdVpiS
[3] Grand dictionnaire terminologique de l’Office québécois de la langue française – http://www.granddictionnaire.com
[4] Gouvernement du Canada – Agence de la consommation en matière financière du Canada / Monnaies virtuelles – http://bit.ly/1jiCnRD
[5] Site bitcoin.org / FAQ – https://bitcoin.org/fr/faq
[6] Rainer Böhme, Nicolas Christin, Benjamin G. Edelman, Tyler Moore, « Bitcoin: Economics, Technology, and Governance », Journal of Economic Perspectives, 2015, volume 29, no. 2, pages 213-238 – http://bit.ly/1LdVpiS
[7] Site coindesk.com – http://www.coindesk.com/information/how-bitcoin-mining-works/
[8] Site bitcoin.org/ à propos de bitcoin.org – https://bitcoin.org/fr/a-propos-de-nous
[9] Star Touch, « How credit card fees for merchants work » – http://on.thestar.com/1P8FYOT
[10] Rainer Böhme, Nicolas Christin, Benjamin G. Edelman, Tyler Moore, « Bitcoin: Economics, Technology, and Governance », Journal of Economic Perspectives, 2015, volume 29, no. 2, pages 213-238 – http://bit.ly/1LdVpiS
[11] Banque du Canada – Documents d’information « Les monnaies électroniques décentralisées (comme le bitcoin) » http://bit.ly/1Nz8vNn
[12] Site 01net.com « Le point sur Bitcoin en dix questions et réponses … » – http://bit.ly/1FYS4aG
[13] Gouvernement du Canada – Agence de la consommation en matière financière du Canada / Monnaies virtuelles – http://bit.ly/1jiCnRD
[14] Thomas Fox-Brewster, « A $50m Drug And Gun Dark Web Market Just Disappeared and Millions in Bitcoin with it », Forbes / Security (18 mars 2015) – http://www.forbes.com/sites/thomasbrewster/2015/03/18/evolution-market-a-scam-says-site-pr/
[15] Dirk Helbing, « Qualified Money – A Better Financial System for the Future » (2014) – Site Social Science Research Network (SSRN)
http://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=2526022 / SSRN-id2526022.pdf
[16] Loi sur la monnaie, LRC, 1985, c C-52 (Monnaie).
[17] Loi sur la protection du consommateur, RLRQ, c P-40.1 (LPC)
[18] Code criminel, LRC, 1985, c C-46 (CCr)
[19] Caroline LAVERDET « Monnaies virtuelles, cryptomonnaies : que reste-t-il des bitcoins? » – journaldunet.com – http://bit.ly/1OshZtZ
[20] « Monnaie virtuelle : Le Bitcoin reconnu au Canada » – banques-en-ligne.ca – http://bit.ly/1R5V1qj
[21] Loi canadienne sur les paiements, LRC, 1985, c C-21, Art 2 (1) « instrument de paiement ».
[22] Angie Ah Kun CA, (SA), Senior Manager, technical Accounting department at KPMG « Bitcoin the currency of the future? », April 2014. http://www.accountancysa.org.za/?p=1474
[23] Morten Brandvold, Peter Molnar, Kristian Vagstad, Ole Christian Andreas Valstad, « Price discovery on Bitcoin exchanges »,
Journal of International Financial Markets, Institutions and Money – http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S104244311500027X
[24] Rainer Böhme, Nicolas Christin, Benjamin G. Edelman, Tyler Moore, « Bitcoin: Economics, Technology, and Governance », Journal of Economic Perspectives, 2015, volume 29, no. 2, pages 213-238 – http://bit.ly/1LdVpiS